phil302 Posté(e) le 27 mai 2005 Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 Bien le bonjour/bonsoir les amis Voilà, j'aimerais vous parler d'un livre. Ce livre s'appelle: La Disparition. Ecrit par : Georges Perec . C'est un livre pas super super... Histoire pas super non plus... Mais que j'ai tout particulièrement aimé, grâce à l'absence de "E" ! Et oui, un livre écrit SANS AUCUN E ! Plus de 300 pages sans la lettre e! Mais comment? On y pense pas trop, mais le e est la lettre la plus utilisée en français ! Bah lui il a réussi ! [:phil302:2] Si vous voulez lire un truc bizarrement écrit, c'est lui ! Citer
Rom1 Posté(e) le 27 mai 2005 Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 Tu pourrai proposer un extrait " Oui, il y a aussi Ismaïl, Achab, Moby Dick. Toi, Ismaïl, pion tubar, glouton d'obscurs manuscrits, scribouillard avorton qu'un cafard sans nom gagnait, toi qui partis, fourrant unsarrau, trois maillots, six mouchoirs au fond d'un sac, courant à ton salut, à ta mort, toi qui, dans la nuit, voyais surgir l'animal abyssal, l'immaculation du grand Cachalot blanc, ainsi qu'un océan lilial dans l'azur froid ! Ils sont partis trois ans, ils ont courus trois ans, bravant tourbillons, ouragans ou typhons, du Labrador aux Fidji, du Cap Horn à l'Alaska, d'Hawaii au Kamtchatka. A minuit, au gaillard d'avant, il y avait Starbuck, Daggoo, Flask, Stubb, du Cap-Cod, Dough-Boy. Pip jouait du tambourin. On chantait: Oh yo Oh yo Pour un flacon d'Alcool ! Un marin nantuckais immortalisait un combat colossal qui, par trois fois, opposait Achab au grand Cachalot blanc, à Moby Dick. Moby Dick! Son nom glaçait jusqu'aux plus forts, un frisson convulsif parcourut l'octogonal tillac. Moby Dick ! L'animal d'Astaroth, l'animal du Malin. Son grand corps blanc qu'un vol d'albatros partout, toujours, accompagnait, faisait, aurait-on dit, un trou au mitan du flot, un noyau blanc sur l'horizon azur, qui vous fascinait, qui vous attirait, qui vous horrifiait, trou sans fond, ravin blanc, sillon fulgurant d'un courroux virginal, couloir qui conduisait à la mort, puits vacant, profond, lacunal, vous aspirant jusqu'à l'hallucination, jusqu'au tournis ! Huis blanc d'un Styx plus nois qu'aucun goudron, tourbillon blafard du Malström ! Moby Dick ! On n'y faisait allusion qu'à mi-voix. Signons-nous, disait parfois un bosco pâlissant. L'on voyait plus d'un marin murmurant tout bas un dominus vobiscum. Alors, apparaissait Achab. Un sillon profond, d'un blanc blafard, traçait son cours parmi son poil gris, striait son front, zigzaguait, disparaissait sous son col. bancal, il s'appuyait sur un pilon ivoirin, moignon royal qu'on façonna jadis dans l'os palatin d'un grand rorqual. Il surgissait, tonnant, hagard, maudissant l'animal qu'il pourchassait voici dix-huit ans, il lui lançait d'insultants jurons. Puis, au haut du grand mât, il plantait, il clouait un doublon d'or, l'offrant à qui saurait voir avant tous l'animal. Nuit sur nuit, jour sur jour, à l'avant du galion, transi, raidi dans son suroît, plus dur qu'un roc, plus droit qu'un mât, plus sourd qu'un pot, sans un mot, sans un clin, plus froid qu'un mort, mais bouillonnant dans son for d'un courroux surhumain, volcan grondant ainsi qu'un bloc raidi chu d'un ouragan obscur, Achab scruta l'horizon noir. La Croix du Sud brillait dans la nuit. Au haut du grand mât, ainsi qu'un point sur un i, l'halo gris baignait d'un clair obscur pâlissant l'or maudit du doublon. Trois ans dura la circumnavigation. Trois ans durant cingla l'hardi galion, louvoyant du nord au sud, roulant, tanguant dans l'inouï tohu-bohu du jusant, bourlinguant sous l'août brûlant, sous l'avril glacial. Un court instant, tout parut s'adoucir. A dix furlongs du galion, Moby Dick glissait, animal divin, paix avant l'ouragan final. Il y avait dans l'air ambiant un parfum saisissant d'absolu, d'infini. Du flot cristallin sourdait, montant, un halo lustral qui donnait à tout un air virginal. Nul bruit, nul courroux. Chacun s'immobilisait, contraignant son inspiration, saisi par la paix qui soudain rayonnait, s'irradiait, alangui par l'amour inouï qui montait du flot calmi, du jour blanchissant. O, instant amical, unisson parfait, absolution ! Avant la mort qui rôdait, l'himalya lilial du grand Cachalot blanc donnait à tous son grand pardon, à Starbuck, à Pip, à Ismaïl, à Achab. Achab ! Front brûlant, tordu, horrifiant, bossu. Un long instant, sans un mot, il fixa l'horizon. Un profond sanglot agita son poitrail puissant. - Moby Dick, Moby Dick ! hurla-t-il à la fin, tonitruant. Allons tous aux canots. Sur son jambart au cuir crissant, Daggoo affûta son harpon au morfil plus aigu qu'un razoir. L'assaut dura trois jours, trois jours d'affronts inouïs, chocs obscurs, corps à corps, vingt six marins unis dans un combat colossal, assaillant dix fois, vingt fois, un harpon plus tranchant qu'un bistouri s'implanta jusqu'aux quillons, jusqu'aux croisillons dans l'animal qui rugissait, bondissait, mais qui nonobstant d'aigus barbillons labourant au plus profond sa chair, d'aggripants crocs tailladant, arrachant à vif, traçant sur son dos blanc d'avivants sillons sanglants, faisait front, s'attaquait aux canots qu'il culbutait, qu'il coulait, puis disparaissait tout à coup au plus profond du flot. Puis un soir, s'attaquant soudain au trois-mâts, moby Dick l'ouvrit d'un coup. L'avant du galion bascula. Dans un sursaut final, achab lança son harpon, mais son fil tortilla. Moby Dick, tournoyant, fonça sur lui. - Jusqu'au bout, j'irai voulant ta mort, hurlait Achab, du fond du Styx j'irai t'assaillir. Dans l'abomination, j'irai crachant sur toi ! Sois maudit, Cachalot, sois maudit à jamais ! Il tomba, ravi par l'harpon qui filait. Moby Dick, bondissant, cloua Achab sur son dos blanc, puis piqua au fond du flot. L'on vit un ravin blafard, canyon colossal, s'ouvrir au mitan du flot, tourbillon blanc dont la succion aspira un à un marins morts, harpons vains, canots fous, galion maudit dont la damnation avait fait un corbillard flottant... Apocalypsis cum figuris: il y aura pourtant, il y aura toujours un survivant, Jonas qui dira qu'il a vu sa damnation, sa mortdans l'iris blanc d'un rorqual blanc, blanc, blanc, blanc jusqu'au nul, jusqu'à l'omission ! Ah Moby Dick ! Ah maudit Bic !" Citer
phil302 Posté(e) le 27 mai 2005 Auteur Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 Oui pardon, mais j'etais en train de l'écrire... Bon merci ! Citer
Spliff Posté(e) le 27 mai 2005 Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 Tu dois lire ça pour les cours ? Citer
phil302 Posté(e) le 27 mai 2005 Auteur Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 Non c'est un ami qui me l'a montré. Et donc j'ai eu envie de le lire... A la recherche du moindre e ... Citer
Spliff Posté(e) le 27 mai 2005 Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 C'est assez original ecrire l'histoire sans E n'est pas le plus dur, c'est de trouver l'histoire, et de la comprendre Citer
Cidji Posté(e) le 27 mai 2005 Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 J'ai vu cette disparition du "E" durant les cours de français, et certains passages sont des réecritures, donc Georges Perec se doit de retranscrire la même idée, mais sans les "E"! J'avoue que c'est du boulot quand même! Citer
gotika Posté(e) le 27 mai 2005 Signaler Posté(e) le 27 mai 2005 j'ai l'impression qu'il y'a que des mots sans e d'origine dans ce bouquin Citer
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